Palantir : la société de logiciels valorisée comme une machine de guerre

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Palantir Technologies, une société de logiciels et d’analyse de données, est devenue l’un des sous-traitants les plus précieux en matière de sécurité nationale, bien qu’elle ne fabrique pas de matériel militaire traditionnel. Ce paradoxe a alimenté le débat : pourquoi une entreprise qui analyse la guerre est-elle plus valorisée que celles qui la mènent ?

L’essor de la guerre basée sur les données

Tandis que les géants de la défense comme Lockheed Martin et Boeing fabriquent des bombes et des balles, Palantir vend les renseignements qui les guident. Fondée avec des liens avec la CIA et un nom inspiré de Tolkien, la croissance rapide de l’entreprise est motivée par les crises géopolitiques et une demande insatiable d’analyses avancées de données en matière de guerre.

Valorisation surdimensionnée, revenus minimes

Le marché valorise Palantir à plus de 400 milliards de dollars, dépassant de nombreuses entreprises de défense établies malgré des revenus nettement inférieurs. Lockheed Martin, leader mondial de la fabrication militaire, génère près de 20 fois les revenus de Palantir, mais est valorisé à une fraction de son prix. Cette disparité met en évidence la confiance du marché dans le potentiel de croissance future de Palantir, alimentée par sa position unique dans le paysage de la sécurité basée sur les données.

Une culture d’entreprise belliqueuse

Les dirigeants de Palantir adoptent ouvertement un ton pugnace et patriotique. Lors des appels de résultats, ils se vantent de soutenir le « combattant de guerre américain » et déclarent fièrement leur engagement en faveur de la suprématie militaire. Cette position sans vergogne, combinée aux contrats lucratifs de l’entreprise avec les agences de renseignement et les forces armées, a solidifié sa réputation d’acteur clé de la guerre moderne.

Scepticisme et vendeurs à découvert

Malgré son succès, Palantir fait face aux critiques d’investisseurs comme Michael Burry, qui parient contre l’entreprise, la jugeant largement surévaluée. Le scepticisme de Burry reflète les craintes que le cours de l’action de Palantir soit détaché de sa performance financière, alimenté par l’exubérance de l’IA plutôt que par une croissance durable.

Les chiffres ne mentent pas

Le ratio cours/bénéfice de Palantir dépasse 400, ce qui signifie qu’il faudrait des siècles pour que ses bénéfices égalent le cours de son action. Cette valorisation extrême soulève la question de savoir si le marché est irrationnellement optimiste ou si Palantir représente véritablement un changement de paradigme dans l’industrie de la défense.

La guerre invisible

L’influence de Palantir s’étend au-delà des champs de bataille traditionnels. Son logiciel est utilisé par les forces de l’ordre, les agences d’immigration et les gouvernements alliés, soulevant des préoccupations éthiques concernant la surveillance et la confidentialité des données. Le succès de l’entreprise est étroitement lié aux conflits mondiaux, les dirigeants reconnaissant ouvertement que les crises géopolitiques créent des « opportunités » de croissance.

Le verdict

Palantir est une entité unique : une entreprise de logiciels valorisée comme une machine de guerre. Sa domination dans le domaine de la sécurité basée sur les données, combinée à une culture d’entreprise belliqueuse, a propulsé le cours de ses actions à des sommets insoutenables. Reste à savoir si le marché se corrigera, mais pour l’instant, Palantir constitue un symbole de la guerre invisible menée dans le domaine numérique.

À long terme, la question demeure : Palantir peut-il justifier sa valorisation, ou le marché finira-t-il par reconnaître que même les renseignements les plus avancés ne peuvent pas remplacer les réalités tangibles de la guerre ?